Ci-dessous le lien vers une réflexion sur LinkedIn de Nawar Zreik:
Comme ma réponse était un peu longue je la donne ici:
Oui, je me suis demandé, en lisant cette réflexion, si l’on ne pourrait pas faire un parallèle avec ceux qui, autrefois, dessinaient à la planche à dessin et qui sont passés, par exemple, à AutoCAD® ou à Revit®. Cependant, je pense qu’il y a une différence importante : AutoCAD® et Revit® sont des logiciels complexes et très avancés. Je n’aime pas trop utiliser le terme « outil » pour ce type de logiciel. Pour moi, un outil, c’est plutôt quelque chose comme le bloc-notes de Windows. Il est clair qu’il faut un apprentissage assez poussé pour bien se servir de ces logiciels.
Nous sommes ici dans une évolution normale des techniques. La planche à dessin est une technique qui utilise des outils professionnels, tout comme AutoCAD® ou Revit®, qui utilisent aussi des outils, même si, dans ce cas, il s’agit d’un logiciel qui est bien plus qu’un simple outil. C’est là que je veux en venir : peut-on parler de l’intelligence artificielle comme d’un outil ? Je ne le crois pas. C’est à la fois bien plus et surtout très différent.
Je ne vais pas débattre de la signification du mot « intelligence » car cela prendrait des heures et ne serait pas très productif. J’ai déjà beaucoup donné à ce sujet. Prenons par exemple Word, qui est pour moi un traitement de texte un peu évolué, certes plus que le bloc-notes de Windows, mais pas fondamentalement différent. En revanche, ChatGPT, qui m’aide chaque jour à résumer des documents en quelques secondes, je ne peux pas le qualifier d’outil. Et cela pour une raison simple : malgré tout le temps que j’ai passé à essayer de comprendre son fonctionnement, je ne sais toujours pas précisément comment il opère. Par contre, je comprends assez bien le fonctionnement d’AutoCAD®, même dans sa complexité, tout comme celui de Word.
En ce sens, on ne peut pas comparer le passage de la planche à dessin aux logiciels de CAO avec le passage des logiciels de CAO à l’intelligence artificielle. Ce n’est pas une question de simple augmentation de puissance de calcul, mais bien un changement de nature que l’on ne maîtrise pas encore entièrement. Même ceux qui ont conçu l’intelligence artificielle n’en ont pas une maîtrise complète, et c’est là toute la spécificité de cette technologie.
Utilisant l’intelligence artificielle moi-même quotidiennement, je me réjouis de son existence, car elle m’économise un temps précieux. Cependant, je l’emploie surtout pour des tâches répétitives et basiques : résumer des textes, extraire des idées, reformuler, corriger l’orthographe et la grammaire, ou encore générer des images. Récemment, je me suis essayé à la création d’images artificielles dans le cadre de la construction d’une maison. J’ai voulu voir ce que l’intelligence artificielle pouvait imaginer à partir des « prompts » que je lui fournissais. Les résultats sont spectaculaires, mais il est évident que je ne construirai pas ma maison à partir de cela. Ces images ne sont ni des plans architecturaux, ni un moyen de communiquer efficacement avec un architecte.
Je ne critique pas l’intelligence artificielle pour cela, car elle n’est pas conçue pour remplacer l’expertise métier, comme celle d’un architecte. Peut-être que cela arrivera un jour, mais ce n’est pas le cas actuellement. Cependant, je salue le fait que ces images générées élargissent mes idées et enrichissent ma réflexion, en m’apportant des perspectives auxquelles je n’aurais peut-être pas pensé.
Pour moi, l’aspect le plus fascinant de l’intelligence artificielle réside dans sa capacité à élargir les idées, souvent à partir de prompts très simples. Elle parvient à générer des concepts auxquels on n’aurait pas forcément pensé, ou alors avec beaucoup de difficulté et de temps. Cela relève presque du miracle.
Je compare souvent l’intelligence artificielle à une réunion de brainstorming, à la différence près que je n’ai pas besoin de réunir plusieurs personnes et experts dans une salle. Tout se fait en une fraction de seconde. Je ne suis pas un fanatique de la vitesse, mais je déteste perdre du temps inutilement.
Ainsi, je partage l’opinion de l’auteur du texte que je commente : je suis technophile, et j’apprécie ce que la technologie apporte au monde. J’ignore volontairement les effets néfastes, car dans toute action humaine, il y a toujours des effets négatifs. C’est inutile de s’y attarder. Comme on dit, on ne fait pas d’omelette sans casser des œufs.
Je ne crois pas que l’intelligence artificielle, du moins dans son état actuel, puisse remplacer l’expertise de nos métiers, que ce soit celui d’architecte ou celui de designer graphique, une crainte fréquente dans cette profession. Cela pourrait changer, bien sûr, mais je n’y crois pas pour l’instant.
On pourrait objecter que l’intelligence artificielle a déjà mis en danger le métier de journaliste, et c’est vrai. Toutefois, si l’on compare un article de presse bien écrit à un texte généré par ChatGPT, la différence est flagrante. Connaissez-vous Philippe Bilger, qui tient un blog très renommé ? À mes yeux, c’est la personne qui écrit le mieux en français aujourd’hui. Je doute qu’une IA puisse un jour atteindre ce niveau d’écriture. Cependant, il est indéniable qu’une bonne partie du travail d’un journaliste moyen peut être remplacée par l’intelligence artificielle.
En fin de compte, je pense que l’intelligence artificielle restera une aide précieuse pour les tâches répétitives et chronophages, mais qu’elle n’atteindra pas le « haut du panier », c’est-à-dire les tâches les plus complexes et créatives. Je ne suis donc pas inquiet face à ces nouvelles technologies.