Le biomimétisme pour l'innovation durable

Ce document de l’Assemblée nationale, daté de décembre 2021, est une note sur le biomimétisme, une approche scientifique multidisciplinaire qui s’inspire de la nature pour l’innovation durable. Il explique que l’humanité a toujours utilisé la nature comme source d’inspiration et détaille trois niveaux de biomimétisme (formes, fonctions, organisation). Le texte souligne le potentiel exceptionnel de la France en raison de sa biodiversité et de ses musées d’histoire naturelle, tout en reconnaissant son retard par rapport à l’Allemagne dans ce domaine. Enfin, il propose des recommandations pour promouvoir le biomimétisme en France, le positionnant comme un outil essentiel pour la préservation de la biodiversité et une incitation à une économie éthique et durable.

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Inspirée par la Nature pour une Innovation Durable

Ce document de synthèse explore le biomimétisme, son histoire, ses applications, sa situation en France et en Europe, ainsi que son rôle essentiel dans l’innovation durable et la préservation de la biodiversité.

1. Qu’est-ce que le Biomimétisme ?

Le terme « biomimétisme » vient du grec :
« bios » = vie
« mimetis » = imitation

C’est une approche scientifique pluridisciplinaire qui s’inspire des propriétés et des stratégies du vivant pour répondre à des besoins d’ingénierie et d’innovation.

Un peu d’histoire

L’inspiration par la nature existe depuis toujours. On pense notamment à Léonard de Vinci, qui dès le XVe siècle dessinait des machines volantes inspirées des oiseaux.
Le concept a été formalisé par Otto Schmitt en 1963 sous le terme « biomimetics », puis popularisé en 1997 par la biologiste américaine Janine Benyus, qui le définit comme une stratégie d’innovation durable et favorable à la nature.

Les trois niveaux d’inspiration du biomimétisme :

  • Formes et structures : pour optimiser aérodynamisme, hydrodynamisme, rigidité, ou allègement.
  • Fonctions et procédés : en chimie, matériaux, etc.
  • Organisation : pour concevoir des systèmes inspirés du fonctionnement des écosystèmes.

:backhand_index_pointing_right: À noter : Le biomimétisme s’inspire du vivant, mais n’implique pas nécessairement d’intégrer des éléments biologiques dans le produit final.


2. Pourquoi le Biomimétisme est-il Pertinent ?

Avec 3,8 milliards d’années d’évolution, la nature a développé des solutions efficaces, résilientes et économes en ressources, issues d’un long processus de sélection sous contrainte environnementale.

Le biomimétisme représente donc :

  • Une formidable source d’innovation face aux défis technologiques et écologiques.
  • Un levier pour la préservation de la biodiversité, car il valorise le vivant et renforce la prise de conscience de son importance.

:backhand_index_pointing_right: Le document rappelle que 1 million d’espèces animales et végétales sont aujourd’hui menacées d’extinction dans les prochaines décennies (p.4), principalement du fait des activités humaines et du changement climatique.


3. Le Biomimétisme en France

Un potentiel naturel considérable

La France bénéficie d’un patrimoine de biodiversité exceptionnel, grâce notamment :

  • À ses territoires ultra-marins
  • À ses institutions comme le Muséum national d’histoire naturelle, qui détient près de 67 millions de spécimens

Mais un retard par rapport à d’autres pays

Malgré ce potentiel, la France reste en retard par rapport à des pays comme l’Allemagne (p.3).

Le Ceebios (Centre d’études et d’expertises en biomimétisme) joue un rôle central pour promouvoir le biomimétisme comme outil de transition écologique (p.2).

Points faibles actuels :

  • Manque d’ingénieurs formés
  • Offres de formation limitées, souvent concentrées dans des masters spécialisés en matériaux ou design
  • Peu d’enseignements dédiés dans les écoles d’ingénieurs

Quelques acteurs français du biomimétisme :

  • Capgemini Engineering
  • Akka Technologies
  • Myceco
  • Bioxegy

4. Exemples Concrets d’Innovations Biomimétiques

  • Militaire :
    Camouflages inspirés du vivant (WW1), formation en V des avions (WW2).

  • Aéronautique :
    Projet « fello’fly » d’Airbus, reproduisant le vol en V pour réduire de 5 à 10 % la consommation de kérosène.

  • Capteurs optiques :
    Inspirés de la fourmi du désert, utilisant la polarisation de la lumière pour la navigation (ISM).

  • Cosmétiques :
    L’Oréal, avec des solutions bio-inspirées pour la protection UV et l’économie d’eau.

  • Agriculture :
    Le groupe M2i développe des phéromones pour lutter contre les espèces invasives sans pesticides.

  • Énergie :
    L’INRAE/LBE étudie les microbiotes des termites et vaches pour améliorer les rendements des méthaniseurs.

  • Environnement marin :
    Projet OASICE de RTE : suivi des impacts des câbles sous-marins via l’étude des coquilles Saint-Jacques, dont les stries indiquent le stress environnemental.


5. Vers un Biomimétisme Durable et Éthique

Pour éviter le greenwashing, le biomimétisme doit respecter des critères éthiques et environnementaux :

  • Conformité à la norme ISO 18458:2015
  • Analyse de Cycle de Vie (ACV) rigoureuse
  • Objectif affirmé de protection de la biodiversité (p.3)

:backhand_index_pointing_right: Le biomimétisme est aussi un levier de sensibilisation auprès des entreprises, les amenant à considérer la biodiversité comme une ressource stratégique et un bien commun.


6. Recommandations Clés pour Accélérer le Développement du Biomimétisme en France

Le document propose 10 recommandations majeures :

  1. Organiser des Assises nationales du biomimétisme, sous l’égide de plusieurs ministères (Écologie, Mer, Agriculture, Enseignement supérieur, Économie).
  2. Mettre en avant la biodiversité marine et ultra-marine, notamment pendant la présidence française de l’UE.
  3. Élaborer une feuille de route pour la filière biomimétisme, avec des actions à court et moyen terme.
  4. Nommer des référents Biomimétisme dans les départements Innovation de chaque ministère concerné.
  5. Créer une charte nationale du biomimétisme, engageant tous les acteurs de la filière.
  6. Mettre en place un label biomimétisme, valorisant les entreprises engagées dans une démarche éthique.
  7. Soutenir la recherche fondamentale en biologie et écologie, et mieux exploiter les collections naturalistes.
  8. Encourager la formation pluridisciplinaire, y compris via la certification de formations continues.
  9. Réaliser un inventaire des projets bio-inspirés, en les référençant dans les appels à projets.
  10. Renforcer les partenariats franco-allemands, avec la perspective de créer une structure européenne dédiée.

Conclusion

Le biomimétisme apparaît comme une voie prometteuse et durable pour relever les défis technologiques et environnementaux d’aujourd’hui.
Il contribue aussi à renforcer notre lien avec la nature et à mieux protéger la biodiversité, source inépuisable d’inspiration.