Le métier d’Ingénieur Structure chez Bouygues Bâtiment
Ce document de synthèse présente les informations clés issues de l’entretien avec Meryem, ingénieur structure chez Bouygues Bâtiment, dans le cadre d’un live de « My Future », une startup sociale aidant les jeunes de 14 à 24 ans dans leur orientation professionnelle. L’objectif est de fournir un aperçu détaillé du rôle, des responsabilités, des défis et des perspectives de ce métier.
1. Rôle et Missions Principales de l’Ingénieur Structure
Meryem travaille en tant qu’ingénieur structure au sein d’un bureau d’études d’une entreprise générale de bâtiment, Bouygues Bâtiment. Son rôle principal se situe dans la phase d’exécution des projets, après les phases de conception.
Ses quatre missions principales sont :
- Assurer la stabilité des bâtiments : C’est l’objectif majeur de son métier. L’ingénieur structure s’assure que le bâtiment ne s’écroulera pas. Cela implique de mener des études pour orienter et justifier les choix structurels et techniques, en se basant sur les Eurocodes (normes européennes).
- « En fait, l’objectif majeur de mon métier est d’assurer la stabilité en question pour qu’il ne s’écroule pas. »
- Réaliser des calculs et vérifications : Meryem effectue des calculs complexes pour déterminer la capacité de charge de chaque élément (poids que peut supporter un plancher, une poutre, etc.), en fonction de la fonctionnalité du bâtiment (ex: un collège avec 30 élèves par classe n’aura pas les mêmes charges qu’un stade de 8000 personnes). Ces calculs, bien que « simples » pris individuellement, forment une « série de calculs » menant à la production de plans d’exécution, notamment les plans de ferraillage (le « squelette » en acier du béton armé). Elle utilise des logiciels métiers, Excel ou même des calculatrices.
- Travailler en équipe : Le métier d’ingénieur structure est intrinsèquement collaboratif.
- Grande équipe (échelle du projet) : L’ingénieur structure interagit avec de nombreux intervenants tels que l’architecte (qui conçoit le projet), le client (qui exprime ses besoins), et l’équipe travaux. Le bureau d’études structure intervient en fin de chaîne, recevant toutes les données d’entrée des autres acteurs. La communication est essentielle pour trouver des solutions qui conviennent à tous, même en cas de désaccord.
- Petite équipe (au sein du bureau d’études) : Meryem travaille en étroite collaboration avec :
- Le projeteur : Dessine la maquette béton et les plans des dimensions des éléments (souvent avec AutoCAD®).
- L’ingénieur (Meryem) : Calcule et produit les plans de ferraillage à partir de la maquette du projeteur et des données de descente de charges.
- Le dessinateur : Retranscrit les plans de ferraillage de l’ingénieur à l’échelle, en respectant les normes, avant vérification finale par l’ingénieur.
- « En fait, c’est une technique qui constitue le bureau d’études. Le bureau d’études, elle intervient enfin, c’est un intervenant parmi la grande équipe qui est constituée je peux vous dire du client, l’architecte, l’équipe travaux… »
- Proposer des solutions : L’ingénieur structure doit être capable de trouver des solutions créatives et adaptées aux contraintes (architecturales, techniques, budgétaires) et aux problèmes imprévus sur le chantier. Par exemple, si l’architecte ne veut pas de poteau au milieu d’un gymnase, il faut proposer une alternative comme une charpente métallique plus légère pour de grandes portées. Il peut aussi s’agir de gérer des « défauts » de coulage du béton pour un rendu esthétique particulier.
2. Qualités Essentielles et Compétences
- Exigence et Précision : Ces qualités sont primordiales car le métier engage la sécurité des personnes.
- « Il faut être précis parce que c’est la vie des gens. » La précision est requise « au millimètre près » pour l’intégration des éléments structurels entre eux et avec d’autres corps de métier.
- Relationnel / Communication : Le travail en équipe est constant, nécessitant une bonne communication et la capacité à trouver des compromis avec les différents intervenants du projet.
- Gestion du stress : Le métier est « assez stressant » car les ingénieurs structure sont souvent « charrette ». Les plans produits doivent être exécutés rapidement sur site (environ trois semaines après), et tout retard de chantier coûte très cher.
- « C’est quand même un métier où il y a un peu de stress. »
- Rigueur et respect des normes : Les normes européennes (Eurocodes) sont strictes et doivent impérativement être respectées.
3. Aspects Spécifiques du Métier
- Responsabilité : L’ingénieur structure a une grande responsabilité en cas d’effondrement. Cependant, les normes incluent des « coefficients de sécurité » et des « pondérations » qui minimisent le risque même en cas d’erreur légère.
- Délais : La durée des projets varie considérablement. Un bâtiment peut prendre environ un an, tandis qu’un pont ou un tunnel peut prendre des années. Les délais sont fixés en amont par le client.
- Déplacements et Sécurité sur Site : Des déplacements sur les chantiers sont possibles pour des réunions ou des visites. Le port des Équipements de Protection Individuelle (EPI) tels que chaussures de sécurité, gilet et casque est obligatoire sur un chantier.
- Normes sismiques : Il existe des règlements sismiques (classant les régions de 1 à 4). L’Île-de-France n’est pas en zone sismique, mais le sud de la France ou Monaco, par exemple, le sont et nécessitent des calculs spécifiques.
- Équilibre vie pro/perso : Meryem travaille de 9h à 17h, cherchant à être « concentrée au maximum » pendant ses heures de travail. Elle travaille trois jours sur site et deux jours en télétravail suite au COVID, ce qui a montré une bonne productivité.
- Avantages : La satisfaction de voir le résultat final de son travail (ex: le siège d’Orange avec son balcon panoramique), la passion pour le métier.
- Inconvénients : Le stress lié aux délais.
4. Parcours et Évolution
Meryem a un parcours international :
- Baccalauréat et classes préparatoires (maths-physique) : Au Maroc.
- École d’ingénieurs : Deux ans à l’École Mohammadia d’Ingénieurs au Maroc.
- Troisième année d’ingénieur : En France, à l’ENPC (École Nationale des Ponts et Chaussées) grâce à un partenariat.
- Stage de fin d’études et alternance : Chez Bouygues, où elle a fait un Master Spécialisé en Management de Projet, avec des missions d’ingénieur structure et de digitalisation (BIM). Elle a enchaîné les contrats, restant dans la même entreprise.
- « L’alternance, de un parce que ça permet de voir le milieu professionnel comment est, on est responsable, on reste pas uniquement dans le cadre pédagogique. » Elle recommande l’alternance pour sa dimension concrète et formatrice.
- Compétences techniques : À la sortie de l’école, un ingénieur junior ne connaît pas toutes les normes mais les « bases ». L’apprentissage se poursuit sur le terrain, avec le soutien de collègues plus expérimentés.
- Évolution du secteur : La digitalisation et le BIM (Building Information Modeling) transforment le BTP. Le BIM permet de centraliser toutes les informations d’un projet sur une maquette numérique partagée (un « cloud centralisé »), facilitant la collaboration entre les différents corps de métier (électricité, plomberie, charpente, etc.) et l’identification des « clashs » (conflits d’intégration).
5. Caractéristiques du Secteur et du Métier
- Mixité : Bien qu’il y ait encore une « dominante masculine » (8 hommes pour 2 femmes dans son bureau), le secteur et Bouygues Bâtiment s’efforcent de recruter de plus en plus de femmes. De plus, l’entreprise de construction ne regroupe pas que des ingénieurs structure, mais aussi des DRH, des commerciaux, des financiers, etc., où la mixité est plus présente.
- Rémunération : Un ingénieur structure est bien rémunéré (environ 36 000-38 000 € bruts annuels en Île-de-France pour le BTP). Cependant, d’autres secteurs d’ingénierie (finance, informatique) peuvent offrir des salaires plus élevés ou des primes plus importantes. Le salaire moyen des ingénieurs structure est « bon », mais il n’y a pas toujours des primes.
- Marché de l’emploi : Le marché est ouvert ; Meryem ne connaît personne qui n’ait pas trouvé de travail. Ceux qui sont passionnés peuvent progresser rapidement.
- Types de projets : Meryem a travaillé sur des ouvrages publics (hôpitaux, collèges, administrations, avec un objectif fonctionnel) et désormais sur des ouvrages privés (tours, stades, centres commerciaux, piscines olympiques, souvent plus complexes architecturalement et axés sur l’attractivité).
- Culture d’entreprise : Les grandes entreprises comme Bouygues Bâtiment organisent des événements (séminaires, soirées karaoké) pour favoriser la cohésion d’équipe et le bien-être des employés.
6. Conseil final de Meryem
« J’encourage les personnes qui trouvent ça passionnant de le faire. Et voilà, il faut aimer son travail, il faut pas suivre aussi que le salaire, il faut aimer ce qu’on fait, ça c’est important parce que c’est ce qui me reste, c’est ce qui dure dans la durée. »
Elle souligne l’importance de la passion et de l’environnement de travail, car les collègues deviennent souvent des personnes qu’on voit très régulièrement.