Quand l'Intelligence Artificielle réconcilie 2D et 3D

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L’architecture à l’épreuve de la révolution numérique : Quand l’Intelligence Artificielle Réconcilie le 2D et le 3D

Dans le théâtre contemporain de l’architecture et de l’ingénierie, nous assistons à une métamorphose silencieuse mais profonde qui redéfinit les contours mêmes de la création technique. L’article de Martyn Day, publié dans AEC Magazine, nous offre une fenêtre privilégiée sur cette transformation où l’intelligence artificielle devient l’arbitre d’une réconciliation longtemps attendue entre les mondes bidimensionnel et tridimensionnel.

Il y a là quelque chose de fascinant dans cette persistance du dessin 2D, cette résistance presque nostalgique d’un médium que l’on aurait pu croire voué à l’obsolescence. Malgré l’avènement triomphal du BIM (Building Information Modeling) et l’essor des modèles tridimensionnels, le dessin technique demeure, selon Day, « la dimension primaire pour les livrables AEC ». Cette permanence n’est pas un anachronisme, mais plutôt le témoignage d’une vérité profonde : dans l’univers de la construction, la représentation plane conserve une efficacité communicationnelle irremplaçable.

Pourtant, ce que révèle cette analyse, c’est moins la victoire du traditionnel sur l’innovation que l’émergence d’un nouveau paradigme où l’automatisation transforme radicalement la nature même de la création graphique. Les dessins « ne disparaîtront pas », nous dit l’auteur, « mais il existe certainement un mouvement axé sur l’automatisation massive de leur création ». Cette nuance est capitale : nous ne sommes pas face à une substitution, mais à une sublimation technologique.

L’intelligence artificielle s’impose ici comme le grand médiateur de cette transformation. Des entreprises comme WiseBIM et BIMify incarnent cette révolution silencieuse, développant des algorithmes capables de traduire les données pixelisées en éléments architecturaux intelligents. Tristan Garcia de WiseBIM souligne avec justesse cette évolution : « L’IA fait des erreurs, mais maintenant les utilisateurs peuvent les corriger dans le flux de travail. » Cette humilité technologique, cette reconnaissance de l’imperfection perfectible, révèle une maturité nouvelle dans l’approche de l’automatisation.

Ce qui frappe particulièrement, c’est cette capacité émergente de conversion bidirectionnelle : non seulement l’IA peut générer automatiquement des dessins à partir de modèles tridimensionnels, mais elle peut également ressusciter l’immense patrimoine architectural documenté uniquement en deux dimensions. Cette faculté de « réanimer » les archives techniques ouvre des perspectives vertigineuses pour la rénovation, la gestion patrimoniale et la création de jumeaux numériques.

L’exemple de Qonic, avec sa fonctionnalité d’Autodrawings, illustre parfaitement cette évolution vers ce que l’on pourrait appeler une « intelligence graphique » : la capacité de produire des représentations non plus seulement exactes, mais véritablement intelligentes, enrichies de données structurelles et contextuelles.

Dans cette mutation, je perçois les prémices d’une transformation plus profonde de l’acte architectural lui-même. Nous assistons peut-être aux derniers moments d’une époque où la représentation technique constituait un obstacle temporel et créatif. Demain, libérés de ces contraintes graphiques, les architectes et ingénieurs pourront-ils enfin se consacrer pleinement à l’essence même de leur art : concevoir et bâtir ?

Cette révolution silencieuse dessine les contours d’un avenir où l’intelligence artificielle ne remplace pas l’expertise humaine, mais la magnifie, lui offrant de nouveaux territoires d’expression et de création.

source: From 2D to 3D and back - AEC Magazine